18 nov. 2010
Affaire des 20 milliards de la Sudatel: Le sursis à statuer aurait pu sauver Abdoul Latif Coulibaly. Est-ce que ses avocats y ont pensé?
Abdoul Latif Coulibaly vient d’être déclaré, selon le langage des juristes, atteint et convaincu du délit de diffamation envers Thierno Ousmane Sy et condamné à un mois de prison assorti de sursis avec paiement de la somme de 20 millions de FCFA à titre de dommages-intérêts.
Cette condamnation est désolante, malheureusement elle est devenue la règle, dans tous les cas similaires c’est toujours le journaliste qui est condamné et jamais on ne connaitra la vérité sur le fond de l’affaire.
Question : Est-ce les magistrats du siège chargés de connaitre de l’affaire qui ne s’acquittent pas bien de leur mission ? Ou est-ce les avocats chargés de la défense du journaliste qui ne sont pas à la hauteur ?
De toute évidence, le tribunal ne peut juger qu’en fonction du délit pour lequel il a été saisi.
Dans l’affaire du Directeur de publication de la « Gazette », le tribunal n’a été saisi que du délit de diffamation. En conséquence il ne peut aller plus loin.
La plupart des journalistes font la confusion entre le délit de diffamation qui est personnel, dont le ministère public n’a rien à voir et l’affaire elle-même (corruption des 20 milliards dans l’affaire Sudatel) qui est l’enjeu principal.
Le juge qui est saisi du délit de diffamation ne cherche pas à savoir si la corruption portant sur les 20 milliards existe ou pas. Ce qui l’intéresse n’est rien d’autre que la relation personnelle Latif Coulibaly- Thierno Ousmane Sy.
En d’autres termes le juge pénal se pose la simple question suivante : « l’article de la « Gazette » porte-il atteinte à la considération ou à la dignité de Thierno Ousmane Sy, conseiller en TIC du président de la République ? Et si Latif n’a pas la preuve de ses allégations il est automatiquement condamné.
Pourtant le fait de corruption peut bien exister sans que Latif n’ait les preuves.
Latif Coulibaly avait-il les chances de s’en tirer ?
La réponse est oui ! Si ses avocats avaient poussé leurs recherches ils auraient pu trouver la solution dans le droit pénal spécial traitant de la diffamation.
En quoi faisant ?
« Lorsque le fait imputé est l'objet de poursuites commencées à la requête du ministère public ou d'une plainte de la part du prévenu, il sera, durant l'instruction qui devra avoir lieu, sursis à la poursuite et au jugement du délit de diffamation »
Cela veut simplement dire qu’il aurait suffit avant la tenue du procès en diffamation que, soit le procureur de la république ou Abdoul Latif Coulibaly lui-même eut déposé une plainte au principal contre le ou les auteurs de la corruption ayant entrainé les détournements des 20 milliards de la Sudatel pour que le tribunal saisi de l’affaire en diffamation ordonne le sursis à statuer.
Le sursis à statuer signifie, avant que le tribunal ne se prononce sur le délit de diffamations qui est accessoire, il doit attendre que la juridiction saisie de l’affaire de corruption au principal se prononce définitivement.
On entend par définitivement, un arrêt définitif de la chambre correctionnelle qui peut prendre des années et des années.
Les journalistes qui, à bon droit dénoncent et divulguent les malversations au Sénégal doivent, pour se prémunir contre les procès en diffamation qu’ils perdent toujours, avoir le courage de déposer eux mêmes plainte au principal contre les auteurs de malversations, puisque le ministére public qui devait normalement s’autosaisir refuse de le faire.
Journaliste-Blogueur
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2 commentaires :
Blaise, pour déposer plainte ne faut-il pas des faits probants, autrement dit des preuves? Si ALC les avait, il les aurait produit devant le tribunal et le résultat aurait été le même, c'est-à-dire la relaxe. Non?
Est-ce qu'un sénégalais n'a pas le droit de porter plainte lorsque l'argent est dilapidé ? C'est d'ailleurs à ce titre que Monsieur Latif Coulibaly a dénoncé la corruption dans cette affaire; certainement ce ne sera pas un journaliste burkinabé qui va le faire.
Mais le seul fait pour le journaliste Coulibaly de déposer la plainte principale pour corruption empêche le juge qui est saisi de la diffamation de tenir le procès par ce que lui-même n’a pas les compétences pour juger toute l’affaire de corruption, et c’est pourquoi il est obligé de sursoir à statuer en attendant une décision définitive sur le fond de l’affaire.
En résumé, il faudra d’abord juger le principal (affaire de corruption) et ce n’est qu’après on attaquera l’accessoire (l’affaire de diffamation)
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